Comprendre la violence pour mieux intervenir auprès des jeunes
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On va pouvoir trouver ici des informations complémentaires pour préciser « le portrait multidimensionnel de l’élève violent  », les points communs et les différences entre les adolescents canadiens québécois et français « violents  », les points communs et les différences entre les adolescents canadiens québécois et français « non-violents  » et les différences entre les productions langagières des adolescentes et adolescents en situation de frustration.
Les sept tableaux qui suivent complètent donc le tableau 9.1 du livre. Il est conseillé d’aborder cette section seulement après avoir lu le chapitre 9 du livre « Transformer la violence des élèves  ».
Scores des élèves violents français et québécois (Cas) et Témoins (non-violents) aux différents tests
Un premier objectif a été de présenter les moyennes en pourcentage des scores des élèves sur les troubles des conduites, les habiletés sociales, la délinquance auto-révélée et le traitement de l’information.
Le tableau 1 présente les résultats des élèves violents et ordinaires à chacun des tests. La colonne % de ce tableau indique l’écart en pourcentage entre l’élève témoin et l’élève violent. Cet écart est calculé à partir du score de l’élève témoin. Aussi, à titre indicateur, nous avons présenté les normes américaines du test sur les troubles du comportement. Bien entendu, ces normes peuvent être différentes en France et au Québec mais elles ne sont pas disponibles. Il faut donc les interpréter avec prudence. Au-delà de ces normes commence donc la pathologie selon les diagnostics établis dans le DSM IIIR.
Comparaison entre élèves violents français et canadiens du Québec
Le deuxième objectif a été de comparer les élèves violents aux élèves témoins français et québécois sur les troubles du comportement. Les résultats des analyses de variance aux tests de l’inventaire du comportement du jeune (Achenbach et Edelbrock, 1991) sont présentés dans le tableau 2.
La première échelle mesure le “retrait†, la tendance à s’isoler, à ne pas communiquer, à la timidité et d’une manière générale à la sous-activité. Les valeurs restent basses légèrement au-dessus de la moyenne mais en dessous de la limite pathologique qui est de 9 pour les garçons et de 8 pour les filles de cet âge. A signaler cependant qu’en France les élèves “cas†ont un score moyen (2,8) plus faible que les élèves témoins (3,82) qui présentent ici la valeur la plus élevée de l’ensemble de la population testée. En France, il n’y a pas de différence significative entre les deux groupes d’élèves. Au Québec, la différence entre les cas et les témoins est significative (F=7,57 ; p = ,007).
La deuxième échelle indique la tendance à la somatisation : maux de têtes, nausées, douleurs diverses. Les valeurs restent faibles pour les 138 élèves testés, le seuil pathologique est de 3 pour les garçons et de 4,5 pour les filles. Cette fois-ci ce sont les élèves français Témoins qui présentent le moins de somatisation et il n’y a pas de différences significatives avec les élèves cas. Il y a des différences significatives au Québec entre les élèves cas et témoins (F = 17,76 ; p = ,000).
La troisième échelle exprime le degré d’anxiété et de dépression des élèves, il est estimé à travers différents comportements qui traduisent la culpabilité, la crainte, la peur d’être non valable, la peur d’être non aimé, la tristesse. La différence significative entre les cas et les témoins est ici nettement marquée dans les deux pays : France F = 7,49 ; p = ,007 ; Québec F = 12,84 ; p = ,000). Le score obtenu à cette échelle par les premiers est proche de la limite pathologique qui est de 11 chez les garçons et de 12 chez les filles.
La quatrième échelle donne une estimation des problèmes sociaux que rencontrent les jeunes (rejet, pleurs, recherches des plus jeunes que soi, etc.). Les différences sont significatives entre les élèves cas et témoins français (F = 21,43 ; p = ,000) et québécois (F = 16,68 ; p = ,000). Dans ce cas, la limite pathologique reste presque atteinte : 9 pour les garçons et 7 pour les filles. Aussi, les témoins des deux pays ont un score très bas même si ce sont les scores des québécois qui sont les plus proches de la normale.
La cinquième échelle vise à identifier des troubles psychologiques compulsionnels, obsessionnels ou d’ordre hallucinatoire. Les scores moyens restent très bas dans tous les cas et en dessous de la limite pathologique (2,5 pour les garçons et 2,7 pour les filles). Il existe une différence significative entre les cas et les témoins québécois (F = 9,76 ; p = ,002)
La sixième échelle fournit une mesure des problèmes d’attention et de concentration des élèves. Le seuil pathologique est à 18-20 pour les filles et 27 pour les garçons. Les différences cas-témoins sont significatives dans les différents pays (France : F=23,23 ; p=,000 ; Québec : F=50,02 ; p=,000) et restent en moyenne en dessous de la limite pathologique. Ce sont encore ici les témoins québécois qui ont le score le plus bas (moyenne de 3,60) et donc qui présentent le moins de troubles d’attention.
La septième échelle évalue les comportements délinquants. La différence cas-témoins est significative dans les deux pays (France : F = 29,45 ; p = ,000 ; Québec : F = 89,05 ; p = ,000). Les cas québécois (moyenne = 7,67) et français (moyenne = 5,76) dépassent le seuil pathologique qui est de 5 chez les garçons et de 7 chez les filles.
La huitième échelle quantifie les comportements agressifs. Les cas français (F = 53,92 ; p = ,000) et québécois (F = 78,15 ; p = ,000) se distinguent très nettement et significativement des témoins. Le seuil clinique des comportements anormaux est dépassé (il se situe à 18-19 pour les filles et 23-24 pour les garçons) car les cas français ont une moyenne de 23,64 et les cas québécois ont une moyenne de 23,14. De plus, comme on peut le constater, les valeurs entre les deux pays sont très proches.
Les “autres problèmes†évaluent des comportements comme « dort en classe », « se ronge les ongles », « harcèle sur le plan sexuel ». Les cas des deux pays obtiennent des scores significativement différents de ceux des témoins (France : F=11,16 ; p=,001 ; Québec : F= 30,29 ; p=,000).
Une échelle mesurant les comportements intériorisés anormaux est obtenue en combinant les échelles 2 et 3. La différence entre les cas et les témoins québécois est significative (Québec : F = 15,89 ; p =, 000), les cas dépassant en moyenne le seuil pathologique fixé entre 10 et 11 pour les garçons. Il faut souligner que le score des témoins Français qui est élevé (moyenne de 9,00) ne se différencie pas des cas (moyenne 12,36) (France : F = 2,15 ; p = 1,45).
Une échelle mesurant les comportements extériorisés anormaux est obtenue en combinant les échelles 7 et 8. Les cas sont ici très différents des témoins et largement au-dessus du seuil de pathologie situé à 7-8 pour les filles et 14-15 pour les garçons (France : F = 53,48 ; p =, 000 ; Québec : F= 91,05 ;
p = ,000).
Il existe également des différences significatives entre les garçons et les filles au niveau de l’évaluation des troubles du comportement. On peut constater un effet d’interaction sexe x cas principalement sur les syndromes exprimant des comportements extériorisés (F = 5,37 ; p = ,002) que sont les troubles de l’attention (F=11,83 ; p= 001), les comportements agressifs (F = 4,86 ; p = ,030), les comportements délinquants (F = 4,08 ; p = ,046) et les autres comportements (F = 5,18 ; p = ,025). Ces résultats indiquent qu’il y a des différences entre les garçons cas et témoins ou les filles cas et témoins.
Comparaison entre élèves témoins (non-violents) français et canadiens du Québec
Le tableau 3 présente les analyses de la variance appliquées aux troubles du comportement des élèves témoins.
Les élèves français et québécois témoins se différencient sur quatre catégories de troubles du comportement. Il y a une différence significative sur les catégories de retrait (F = 7,15 ; p = ,009), de l’anxiété/dépression (F = 5,13 ; p = ,025), des troubles de l’attention (F = 5,58 ; p = ,020 et des problèmes intériorisés (F = 5,23 ; p =,024). Les élèves français témoins obtiennent un score moyen plus élevé sur ces quatre catégories que les élèves québécois. Cela signifie que les élèves français sont plus en retrait (moyenne des français = 3,82 ; moyenne des québécois = 1,40), ont plus de problèmes d’anxiété/dépression (moyenne des français = 5,27 ; moyenne des québécois = 2,08), plus de troubles de l’attention (moyenne des français = 7,95 ; moyenne des québécois = 3,60) et plus de problèmes intériorisés (moyenne des français = 9,00 ; moyenne des québécois = 3,92) que les élèves québécois. Il n’y a pas de différences significatives pour toutes les autres catégories de comportement.
Résultats concernant l’étude des productions langagières des élèves en situation de frustration
Pour comprendre les tableaux qui suivent, on aura intérêt à se reporter à la section où sont décrits le test (test 4) portant sur l’évaluation des paradigmes de traitement de l’information.
Dans le tableau 4, les réponses des élèves aux neufs scénarios, pouvant potentiellement engendrer de la frustration, ont été analysées d’un point de vue traitement de l’information avec la grille décrite dans la section du test 4. Les huit catégories de réponses ont été regroupées en réponses qui auraient pu, en situation réelle, être exprimées oralement ou non, et en fonction d’un traitement dogmatique ou non dogmatique.
Dans le tableau 4, les catégories ombrées vont faire l’objet d’un traitement statistique afin de préciser l’éventualité d’un association de la violence avec l’expression orale et/ou le traitement dogmatique. Ce traitement statistique est présenté tableau 5.
Analyse
• Les élèves cas et témoins québécois ainsi que les élèves cas français ne présentent pas de différences significatives au niveau du nombre de réponses non exprimées oralement.
Alors que les témoins français sont différents et présentent environ 45 % de réponses supplémentaires de ce type. Ce résultat confirme le caractère “inhibé et retenu†déjà observé avec les tests des troubles de conduite de la population des élèves témoins français.
• Les élèves cas français et les élèves cas québécois ne constituent pas ici des populations différentes sur le plan du mode d’expression oral ou non et sur le plan du traitement de l’information.
• Les élèves cas présentent significativement plus de réponses de types dogmatique (en moyenne 50% de plus) que les élèves témoins mais l’écart entre cas et témoins est beaucoup plus marqué au Québec qu’en France (70% de réponses supplémentaires).
• Le groupe d’élèves français est également significativement différent du groupe témoin canadien dans le sens où il produit 50% de réponses dogmatiques de plus que celui-ci.
Analyse comparée de l’influence de l’appartenance à un sexe dans la manière de répondre en situation de frustration
Dans le tableau 6 sont présentés les différentes catégories de réponses des élèves en fonction de leur sexe et de leur appartenance aux groupes élèves violents (CAS) ou aux témoins.
Les catégories ombrées vont faire l’objet d’un traitement statistique dans le tableau 7 afin de préciser l’éventualité d’un lien entre l’appartenance à un sexe et l’expression orale ou non, le traitement dogmatique et la capacité à mentionner des émotions.
Analyse
• La variable sexe n’a globalement pas beaucoup d’influence sur les résultats, celle-ci est cependant plus sensible en ce qui concerne le mode d’expression, les garçons produisent en général moins de “réponses non exprimées oralement en situation réelle†(cat. 1 à 4), que les filles. Cette différence est de 6% pour les élèves témoins et 20% pour les élèves cas mais la seule différence significative n’est trouvée qu’entre les témoins masculins et les cas masculins, la différence étant alors de 26% pour ce type de réponses.
• Pour chaque sexe la production de réponses dogmatiques est significativement supérieure chez les élèves cas d’environ 40% mais la différence sexuelle de l’ordre de 2% entre élèves témoins et entre élèves cas n’est pas significative.
• La capacité à identifier et à mentionner des émotions semblent différer en fonction des sexes. Les témoins masculins produisent 70% d’énoncés mentionnant une émotion de plus que les témoins féminins mais cette différence tombe à 8% et n’est plus significative si on considère l’ensemble des élèves cas. Les cas produisent significativement moins d’énoncés comportant une émotion ou un sentiment que les témoins, mais cette différence de 68% est très marquées et significative chez les garçons et moins marquée et non significative chez les filles.